02 novembre 2006


Au bout de la rue, Bondi Beach. (Provia 100, Yashica T4) - 2003


Après une journée de bureau, de temps en temps, j’appelle mon mon pote Chris pour aller skater. En général on se dirige vers Bastille pour faire des wheelings, sinon on va faire des descentes le long du Père Lachaise… On essaye de ne pas faire trop de bruit, on choisit des spots qui ne résonnent pas trop et on ne fait que passer dans les petites rues.

Il fait nuit, l’agitation parisienne s’éteint doucement.
Cette fois, on a décidé d’aller skater la place avec le trottoir et les deux marches. C’est pas mal. On a ridé à fond pour arriver jusque-là, on est déjà chauds. Au bout d’un petit moment un type arrive en poussant son vélo, titubant. Saoul. Sans son vélo pour s’accrocher, il tomberait par terre. Il comprend finalement qu’il n’y arrivera pas et décide de s’allonger sur un banc. On rigole, on se dit que ce serait facile de lui piquer son vélo. Il s’endort instantanément, en gardant une main sur son guidon. On continue à skater, en espérant que les deux mecs bizarres sur le banc d’à côté n’aient pas la même idée que nous. Ils l’ont. Le type bourré s’accroche comme il peut à son vélo pendant qu’un des deux autres essaye de lui arracher. Il faut y aller. Il va falloir éviter la baston, c’est pas gagné. « Lâche le vélo, lâche le vélo ! », je gueule. « Lâche le vélo ! », avec ma board à la main, genre j’ai pas peur. J’essaye de maintenir la pression en gueulant encore plus fort. Son pote l’a déjà lâché, il est seul, on est deux, deux et demi contre lui. Il s’enfuit en courant. L’autre se relève, nous remercie rapidement et remonte sur son vélo. Il manque trois fois de s’étaler et disparaît à son tour. On va aller skater ailleurs.

Le longues bosses sur le boulevard Richard-Lenoir, c’est toujours marrant à skater. Il faut courir et sauter sur sa board pour avoir assez de vitesse pour aller jusqu’au bout. On y passe toujours à un moment ou à un autre de la session. Il faut faire wheeling jusqu’au bout, sur le trottoir, jusqu’à la piste cyclable, en évitant la poubelle. Je vois un clochard se diriger vers nous, il marche doucement, il a une doudoune sale et il parle tout seul. Il s’approche de moi. Il est rouge de colère, d’alcool aussi peut-être, et désespéré. Il me dit que le foyer de l’autre côté de la rue vient de lui refuser l’entrée et qu’il va devoir dormir dehors. Ça le met hors de lui. Lui qui a trois filles, lui qui a soixante deux-ans. Je ne sais pas trop quoi dire, mais je trouve quelque chose. Et puis ses yeux se remplissent de larmes, il me dit que je pourrais être son fils. C’est si vrai que ça me transperce. Je mets la main sur son épaule, je le bouscule amicalement, je lui dis qu’il faut garder le moral. Il va devoir tenter sa chance à Peireire, qu’il dit. C’est de l’autre côté de Paris. Il doit être minuit, et c’est sa dernière chance. Je l’encourage, lui dit qu’il faut qu’il aille attraper le dernier métro, sinon c’est foutu. Ca m’arrangerait bien aussi qu’il y aille, je pourrais rentrer mon wheeling… Il y va. J’ai l’impression quand même de l’avoir aidé, un peu, en prenant une minute pour écouter et essayer de le réconforter. Je rentre mon wheeling. J’espère qu’il reste une place à Peireire.

On va sur l’autre palette, un peu plus loin. Les deux dernières fois où j’ai skaté là, quelqu’un nous a balancé des œufs depuis une fenêtre. On fait gaffe, on évite les flips sur le trottoir. On reste dix minutes et il est temps de rentrer à la maison. On se dit au revoir et je file.

La ville est calme, les trottoirs sont déserts, quelques couples s’écartent sur mon passage. J’arrive dans mon quartier, alors de descends de ma board, je ne voudrais pas réveiller tout le monde. Je tourne au coin de ma rue et je vois au loin une fille qui marche dans ma direction, suivie d’un ‘lascar’ qui lui réclame une cigarette, ou autre chose. Ses deux potes l’observent, de loin. Ils se marrent. En s’approchant, le regard de la fille se fixe au mien. Au moment où l’on se croise, je comprends son appel à l’aide. En deux secondes j’analyse. L’équation est vite-fait : ils sont trois, je suis seul. Tout en continuant à avancer je me retourne. Le connard insiste mais n’est pas vraiment agressif. Je rentre chez moi, la conscience pas tranquille. Finalement je ne suis pas un héros.

2 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Chaud comme blouson ??????

11:04 AM  
Anonymous Anonyme said...

j'ai deja vu des clodos se faire jeter du foyer bvd richard lenoir mais c'est pas toulours parcequ'il n'y a pas de place c'est aussi qu'il n'accepte pas ceux qui ont trop bu. J'ai deja vu une femme se coucher par terre au milieu du boulevard devant la porte du foyer parce qu'il venait de la refuser elle était completment alcoolisée et a failli se faire écraser.

8:13 AM  

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